L’agence de presse AEF a dévoilé les travaux du Conseil Supérieur des Programmes, instance indépendante du Ministère mise en place par la loi d’orientation, et qui a été missionnée par le Ministre Vincent Peillon de réécrire le socle commun de connaissances, de compétences et de culture, les programmes scolaires et les objets d’étude interdisciplinaires.

Le projet de réforme du collège malmène la structuration disciplinaire du collège. Il s’inscrit pleinement dans le projet de scission du second degré, entre d’une part un école du socle regroupant l’école primaire et le collège, et d’autre part le bloc bac-3/bac+3 regroupant les lycées et l’université.

La conception de l’interdisciplinarité à l’œuvre dans le projet Vallaud-Balkacem éclaire d’un jour nouveau la volonté de mettre à bas le collège comme propédeutique au lycée et le renoncement à toute élévation générale des qualifications de l’ensemble de la jeunesse.

Les huit thèmes proposés pour les Enseignements Pratiques Interdisciplinaires sidèrent la profession par leur banalité et leur étendue :

- Transition écologique et développement durable

  • Sciences, Technologie et Société
  • Information, communication et citoyenneté
  • Langues et cultures de l’Antiquité
  • Langues et cultures étrangères ou régionale
  • Monde économique et professionnel
  • Corps, santé, sécurité
  • Culture et création artistiques

Ces thématiques, ni explicitées, ni problématisées, ni rendues opérantes par des programmes définis, peuvent donner lieu à toutes les interprétations, à toutes les dérives et sont de nature à maximiser les inégalités scolaires. Les exemples présentés dans la presse ne parviennent d’ailleurs pas à masquer la vacuité des activités proposées.

On se satisfait cependant que l’amendement du SNPDEN-UNSA, syndicat majoritaire chez les chefs d’établissement, visant à renommer le thème « Monde économique et professionnel » en « Économie et entreprise » ait été rejeté.

On soulignera l’apparition du qualificatif « pratique », par opposition à d’autres enseignements supposés « théoriques », ennuyeux, ou hors de portée pour la majorité des élèves, ceux qui permettent justement d’inscrire l’élève dans un parcours intellectuel le menant vers des poursuites d’études qui lui permettent d’entrer dans les œuvres, les productions humaines, les savoirs, structurés en disciplines.


On ne peut que s’offusquer de la mise au rebut des travaux du Conseil Scientifique des Programmes autour d’une toute autre approche de l’interdisciplinarité.

Selon une note confidentielle du 25 février 2015 que le CSP a remise au Ministère, et que l’agence de presse AEF a diffusée, les membres du Conseil Supérieur des Programmes s’étaient accordés sur dix « objets riches » d’études interdisciplinaires qui auraient permis un travail en commun entre au moins deux disciplines, à partir des programmes disciplinaires propres à chacunes de ces disciplines, et sur la base de questionnements intellectuels que peuvent avoir « de jeunes adolescents en lien avec les grandes questions contemporaines » :

A en croire l’AEF, "les 10 thèmes pour monter des projets interdisciplinaires proposés par le Conseil des programmes :

- Visible et invisible

- La gestion des ressources naturelles (eau, énergie, matériaux)

- La ville

- Mon histoire et celle de l’humanité

- Le pluralisme

- Informations et savoirs

- Productions et distributions

- Santé et physiologie de l’effort

- Comprendre le passé

- L’homme augmenté

Selon le CSP, ces enseignements interdisciplinaires « contribuent tout particulièrement à l’acquisition de compétences complexes qui permettent aux élèves de choisir et combiner, parmi les procédures qu’ils maîtrisent, celles qui conviennent à une situation ou à une tâche non connue et complexe ».

« Ils ne constituent pas un programme bis, mais, en continuité avec les approches disciplinaires, les objectifs et attendus du cycle, ils constituent des possibilités d’approfondissement de thèmes du programme que les enseignants traitent d’un point de vue plus strictement disciplinaire », décrit le CSP.

Ceci n’est qu’un des axes sur lesquels appuyer une autre réforme du collège, qui suppose également la baisse des effectifs par classe et la multiplication des temps d’étude avec des effectifs réduits.

Une fois de plus, les décideurs politiques imposent des réformes qui ne sont pas concertées et qui négligent l’avis des professionnels. Ceux qui connaissent la réalité du travail parce qu’ils le pratiquent au quotidien voient leur expertise niée. On ne peut que ressentir de la colère face au gâchis que représentent les annonces unilatérales du Ministère.


Le SNES-FSU, avec une intersyndicale qui représente 87% de la profession dans notre académie, appelle la profession à se mobiliser pour obtenir le retrait de la réforme Vallaud-Blekacem, parce qu’une autre réforme du collège est souhaitable, parce qu’une autre réforme du collège est possible, parce qu’une autre réforme du collège est prête !