Aix-en-Provence, le vendredi 09 janvier 2015.
La vocation de la réunion de ce jour est d’installer la nouvelle CAPA issue des récentes élections professionnelles. En cette circonstance, et à l’aube de cette nouvelle année, nous pouvons souhaiter que nos échanges soient cordiaux, comme ils l’ont toujours été je crois, qu’ils puissent s’effectuer dans un respect et une écoute réciproques, une compréhension mutuelle, et, peut-être, que quelques unes de nos attentes, lesquelles, nous en sommes convaincus, participeraient d’une évolution positive de notre système éducatif, puissent être entendues.
Bien que ces dernières élections aient confirmé que le SNES FSU restait le syndicat majoritaire au sein de l’Éducation Nationale, ce fut au prix d’un très gros effort d’incitation et de mobilisation des collègues. En effet, et ainsi que nous l’avions déjà constaté lors des dernières élections professionnelles, la dématérialisation du vote induit une distanciation et des contraintes particulières par rapport à cet exercice démocratique (contraintes techniques, modalités d’inscription, délais, etc.) et complexifie la démarche pour beaucoup de collègues. La suppression du vote sous sa forme traditionnelle constitue un réel facteur dissuasif dont il ne faut pas ignorer l’impact. Cela a induit parallèlement une inondation de courriels de campagne par toutes les organisations syndicales qui ont pu conduire à l’indigestion et à la nausée. Cela contribue, en somme, à décourager toute participation en un temps où, précisément, le sentiment est très partagé que l’on n’a de cesse de vouloir nous imposer de plus en plus d’obligations, et qu’il existe une volonté de rendre notre tâche chaque jour un peu plus lourde.
En aucun cas il n’est question d’un quelconque désintérêt à l’égard de l’expression syndicale, encore moins d’un questionnement relatif à la nécessité d’une telle représentation ou d’un désaveu de son action, comme certains se plairaient à vouloir le faire croire. Au contraire, beaucoup s’accordent à penser qu’il y a eu, au travers de la refonte soudaine et radicale des procédures de ces élections, une volonté politique manifeste de minorer leur importance et de bâillonner, autant que faire se pouvait, l’expression syndicale, jugée sans doute par trop contestataire et comme une entrave aux réformes que l’on souhaiterait imposer de préférence sans aucune concertation, en faisant ainsi l’économie, une de plus, du dialogue social. Une campagne réellement incitative, à tous les échelons de notre hiérarchie, est absolument nécessaire.
Trop d’éléments nuisent de plus en plus gravement à l’attractivité de nos métiers :
La faiblesse de nos salaires gelés depuis des années. Notre incapacité à obtenir la moindre satisfaction concernant ces demandes réitérées de revalorisation devient d’autant plus inacceptable que certains personnels de la fonction publique ont bénéficié d’une bonification indiciaire significative, voire de primes, dont certaines ont été opérées de surcroit, de façon rétroactive. Enfin, il semble que notre catégorie en particulier, une fois de plus serait-on tenté de dire, soit passée au second plan dans les discussions liées aux conditions d’exercice en éducation prioritaire. Quelles compensations en termes de temps de travail/créations de postes et/ou d’indemnités ?
La dégradation des conditions de travail avec des vies scolaires fonctionnant à minima, faute d’être dotées de personnels en nombre suffisant : des assistants d’éducation qu’il nous faut pleurer, fragilisées encore dernièrement par des affectations très ponctuelles d’emplois précaires. Trop de CPE sont confrontés à des effectifs d’élèves incompatibles avec un exercice complet de leurs missions, plaçant la catégorie dans des tensions subies au travail telles, qu’une proportion non négligeable de CPE se trouve en situation de risques psycho-sociaux avérés, ainsi que l’a démontré dernièrement l’enquête de la MGEN. Il est donc plus que jamais urgent que les implantations de postes deviennent effectives si l’objectif essentiel reste bien de garantir la sérénité du climat scolaire. Il n’est pas possible d’assigner des objectifs, aussi louables soient-ils, sans fournir les moyens nécessaires pour les atteindre.
Les discussions trop nombreuses et souvent conflictuelles relatives à notre temps de travail, en l’absence d’un cadre horaire clairement défini, maintes fois signalées, ne devraient plus être à l’ordre du jour.
Plus globalement, les réformes qui s’enchainent les unes après les autres, sans que l’on fournisse nécessairement les outils pour les mettre en œuvre, les allers-retours permanents, et nous ne citerons ici comme exemple que l’expérience très révélatrice de la note de vie scolaire, dégradent la cohérence du fonctionnement de notre Institution, pour ne pas dire sa crédibilité, et entrainent une lassitude de plus en plus prégnante chez nombre de collègues, d’autant plus qu’ils ont l’impression de n’être plus considérés et respectés dans leurs missions… Surtout lorsqu’on leur martèle publiquement qu’ils doivent faire montre de bienveillance, étant sous entendu sans doute qu’ils en manqueraient ou bien encore que l’exercice de l’autorité serait encore plus suspecte qu’il ne l’est déjà. Certaines tergiversations, certaines thématiques récurrentes mais dont les modes se fanent vite, épuisent les équipes éducatives et pédagogiques. On se souviendra aussi de la réforme des sanctions disciplinaires, avec la mise en avant du principe du contradictoire, comme si celui-ci pouvait être ignoré par nos professions, complexifiant et alourdissant encore dans des actes procéduraux notre tâche. Le délai impératif de trois jours est apparu, aux yeux de la très grande majorité, y compris au regard des chefs d’établissement, inutile et surtout très déconnecté des pratiques et des réalités du terrain, et plus encore, cette mesure jetait d’emblée une suspicion sur les décisions prises par l’autorité administrative, les rendant, et par le jeu d’une grande publicité, systématiquement contestables, fragilisant encore, comme s’il en était besoin, notre autorité et les fondements de l’Institution.
L’installation de cette CAPA, pour laquelle nos collègues nous ont donné mandat, reste pour nous l’occasion d’en rappeler les contenus ou les finalités essentielles :
Application d’une règle commune, équitable, juste, pour tous ;
Vérification des actes de gestion pour en garantir la transparence (et à cet égard, nous vous serions infiniment reconnaissants de veiller à ce que tous les documents nécessaires nous soient transmis pour leur étude au moins une semaine avant la tenue des commissions) ;
Défense d’une carrière possible pour tous et d’une véritable mobilité laquelle, déjà fortement et de plus en plus limitée, est encore réduite par le nombre de poste bloqués pour des stagiaires débutants. Ces derniers devraient, pour des raisons évidentes liées aux nécessités et à l’efficacité de la formation, être, comme c’était le cas auparavant, rattachés en surnombre à un agent titulaire et faisant fonction de tuteur.
Il reste impératif que, selon nous, l’avancement de carrière soit déconnecté de l’évaluation, et nous revendiquons toujours une double notation pour le corps qui irait de pair avec la création d’un corps d’inspection directement issu de notre catégorie professionnelle, qui n’a plus à faire la preuve de sa spécificité.
Il nous apparait souhaitable que les CPE puissent être véritablement accompagnés et conseillés tout au long de leur parcours professionnel, et sans doute serait-il utile, comme dans d’autres professions de santé ou d’éducation, de leur permettre d’accéder pour le moins à de l’analyse de pratique professionnelle. Cependant, il ne nous apparait pas raisonnable, sur le champ de la formation professionnelle, d’inverser la loi de l’offre et de la demande, et il nous semble légitime que ce soit l’Institution, forte des objectifs éducatifs qu’elle aura su définir, en partenariat, bien sûr, avec ses collaborateurs, qui propose et mette en place une formation de qualité à ses personnels.
C’est l’ensemble de ces points que nous nous efforcerons de défendre et de promouvoir, avec votre soutien nous l’espérons, car nous ne pouvons pas douter que nous partageons les mêmes objectifs. Notre engagement n’a de sens que dans une volonté commune d’apporter chacun notre contribution à l’édification d’un service public d’éducation juste, performant, efficace, sûr de ses valeurs.
Enfin, dans les sombres circonstances que nous traversons, gageons que notre profession saura rester, comme elle l’a toujours été, mais avec un souci particulier et dans son identité si singulière, la garante des principes de laïcité républicaine, et le porte parole de la liberté d’expression, dans le respect, bien entendu, des obligations inhérentes à notre statut.
Les commissaires paritaires, Stéphane Contoux, Ramadan Aboudou, Philippe Moreaux, Eric Luthy, Djillali Antar, Céline Goll-Leca.