Le rapport de la concertation a été remis au ministre de l’Education nationale vendredi.
Il prétend pointer les consensus que les discussions ont permis de dégager, en particulier sur l’état du système éducatif aujourd’hui, et il dégage des propositions.
Les constats, qui reflètent les débats de la concertation, prennent bien la mesure des grippages actuels du système éducatif et tentent de les replacer au regard des évolutions profondes de la société française.
Mais le rapport prétend en tirer des préconisations pour le second degré qui non seulement ont été fortement contestées dans les groupes mais frappent par leur pauvreté : il ne s’agit que du recyclage de représentations convenues, nullement étayées par de quelconques études et qui n’aboutiraient qu’à affaiblir la professionnalité des enseignants sans gain réel pour les élèves.
Force est donc de constater que ces propositions concernant l’avenir du second degré et de ses personnels sont problématiques, d’autant qu’elles n’ont pas fait accord dans les débats et en particulier avec les organisations les plus représentatives des personnels enseignants.
Ainsi, l’analyse des politiques éducatives précédentes se limite-t-elle à une absence de moyens, de cohérence et d’accompagnement des réformes qui, sur le fond, ne sont pas remises en cause. Rien n’est dit sur la dégradation continue des conditions de travail, du grand bazar dans les lycées provoqué par la réforme des voies générales et technologiques, du refus très largement exprimé par les personnels du socle commun et de son livret…
Sur ces points, le rapport s’inscrit donc dans la continuité des politiques ségrégatives mises en place notamment avec et depuis la loi Fillon, tout en développant un discours de justice sociale, partagé par toute la communauté éducative, sur l’indispensable égalité qui reste à construire.
Le rapport propose de revenir sur le socle commun de la loi Fillon pour « définir un ensemble de compétences et de connaissances obligatoires pour tous » et affirme « la nécessité d’un programme obligatoire de culture et de compétences ».
Le SNES et le SNEP sont prêts à travailler à cette définition mais le maintien de la conception « socle commun », même assorti de la préoccupation qu’il ne soit pas « conçu comme un savoir minimum », fait craindre que l’on retombe dans les travers dénoncés à propos de la loi Fillon. Même s’il est affirmé que : « les objectifs du collège doivent clairement s’inscrire dans la double logique du socle commun de la scolarité obligatoire et de la poursuite d’études dans le second cycle », le collège est de fait recroquevillé sur la seule scolarité obligatoire, actant ce faisant que l’objectif du socle commun n’est pas la poursuite d’études et reprenant la logique de viatique portée par le socle commun de la loi Fillon.
En affirmant, sans jamais en apporter la moindre preuve, que « pour gérer l’hétérogénéité scolaire, le collège unique doit assumer la continuité avec l’école primaire », les rapporteurs justifient leurs propositions d’échanges de services entre enseignants du premier et du second degré, d’enseignement par « champs disciplinaires », ouvrant ainsi la voie au retour de la bivalence au collège et à l’installation de « réseaux du socle », même si l’expression n’est pas utilisée.
La limitation du nombre d’heures de cours au collège se traduirait par une diminution des horaires disciplinaires. Cela risque de renvoyer aux familles le contenu de ce qui ne sera plus fait en classe, aggravant ainsi les inégalités. Couplée aux propositions de parcours culturels et artistiques en dehors de ces heures et au discours sur les fondamentaux elle fait craindre pour l’avenir des disciplines artistiques et de l’EPS.
L’absence totale de référence au sport scolaire du second degré, y compris lorsque le rapport parle de l’accès des jeunes à la culture et à la vie associative n’est pas sans inquiéter !
En ce qui concerne l’avenir du lycée, l’affirmation que « la majorité des participants à la concertation n’a pas souhaité remettre en cause la réforme en cours dans les voies générales et technologiques » fait fi de l’opinion largement majoritaire des personnels qui subissent cette réforme dans des conditions douloureuses et déstabilisatrices, réforme qui notamment, condamne les séries technologiques industrielles d’une part et la série L et les enseignements artistiques d’autre part à une mort certaine à court terme.
Les préconisations concernant l’orientation sont totalement inscrites dans le désengagement de l’Etat, anticipant les décisions à venir dans le cadre d’un nouvel acte de décentralisation. Restant cependant floues dans leur traduction concrète, elles portent de lourdes menaces sur l’avenir de l’orientation scolaire et de ses personnels.
Concernant la formation des enseignants, le SNES et le SNEP se félicitent que le rapport reprenne plusieurs des propositions qu’ils portent :
— pré-recrutement au niveau licence
— écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE) composantes de l’université — nécessité d’un cadrage national
— équilibre entre formations académique et pédagogique
— entrée progressive dans le métier
— nécessité de formation continue…
Le SNES-FSU et le SNEP-FSU espèrent que la phase de négociations qui va s’ouvrir après les premiers arbitrages du ministre Vincent Peillon permettra d’éviter des choix partisans contre les personnels de second degré et ce qui fonde leur professionnalité et leur engagement dans le service public d’Education nationale, choix qui ne permettraient pas aux collèges et lycées d’assumer pleinement leur rôle dans la réussite de tous les jeunes.