L’Ecole dans le droit fil du programme présidentiel.
L’Ecole focalise des éléments forts de la politique présidentielle (stratégie de rupture sur des points clefs : carte scolaire, offre éducative, conception du métier / approche comptable, réduction de l’emploi public, travailler plus pour gagner plus etc.).
Elle est un enjeu essentiel de la stratégie présidentielle.
Au cœur de la Fonction Publique, elle constitue un terrain décisif pour la réforme de l’Etat. Par ailleurs, elle doit devenir un élément actif dans la tentative de formatage de la société dans un sens libéral (l’éducation mise au service des entreprises, promotion des valeurs de concurrence, de performance, de rentabilité, sélection des élites et individualisme, destruction des solidarités, consécration des inégalités). C’est toute la problématique de Lisbonne et de la compétitivité économique qui est en balance dans la volonté présidentielle.
Par les valeurs et la fonction qui sont les siennes au sein de la République, l’attachement des enseignants aux idéaux de laïcité, d’égalité et d’émancipation, la promotion d’un idéal de culture démocratique en opposition aux valeurs marchandes, l’Education Nationale fait obstacle à ce projet. Mais à la différence de ceux qui l’ont précédé (Rocard, Fauroux, Bayrou, Allègre) N. Sarkozy a décidé d’affronter l’obstacle.
L’importance des enjeux de cette bataille (enjeux budgétaires, économiques, sociaux et politiques) autour de l’école et de la formation explique en grande partie l’intensité et la virulence de la campagne de dénigrement dont elle est l’objet : peu performante, inégalitaire, rigide, budgétivore, irréformable, elle est présentée comme un « grand corps malade » que la politique du nouveau président est chargée de soigner et de remettre sur pied.
Bien entendu, dans ce cadre, les enseignants ne sont pas oubliés et la grande transformation annoncée ne se fera pas sans que les missions, les services, les recrutements, la formation des professeurs ne soient revus dans la perspective globale d’une dégradation de leur condition.
Baptisée « refondation » et « revalorisation », lancée à grand renfort médiatique (« gestes de bonne volonté », lettre aux enseignants, interventions multiples de Darcos, offre de tables rondes et de livres multicolores – vert, blanc, etc) cette politique est en réalité une politique de rigueur budgétaire et de renoncement éducatif qui s’apparente davantage à une saignée lourde de conséquences pour l’Ecole.
Elle se caractérise par un double transfert et un double renoncement : transfert sur les moyens (suppression de postes et dans le même temps augmentation des heures supplémentaires :
dans notre académie - 148 postes / + 120 000 HSE, soit l’équivalent de 200 postes ;
baisse des recrutements et augmentation des intervenants non enseignants précaires) et transfert sur les contenus (poursuite de la diminution des horaires et des contenus enseignés en classe et dans le même temps augmentation de l’école après l’école).
Renoncement budgétaire illustré par les pertes de postes (rentrée 2007 : - 5000, rentrée 2008 : - 11200) mais également renoncement à l’ambition éducative : mise en place du socle commun, réduction de l’offre d’éducation (réduction des options) et maintenant annonce officielle de la diminution des horaires (déclaration de N.Sarkozy face à la presse régionale le 21 août : « en réduisant le nombre d’heures effectuées on réduit globalement le nombre d’heures de cours, donc on pourra économiser des postes »).
De fait, la rentrée 2007 est placée sous le signe de l’austérité, du dégraissage et de l’aggravation des déséquilibres :
- poursuite de la politique de Robien : socle commun (mis en place dans le primaire à la rentrée), recentrage des moyens de l’éducation prioritaire sur les ambitions réussite
- mise en place du conseil pédagogique.
- augmentation des seuils dans les divisions par un refonte de la typologie des collèges (plus de 50 établissements « promus » dans une catégorie supérieure = des élèves en plus dans les classes)
- assouplissement de la carte scolaire (+ 18% de demandes dérogation pour les 6es dans les BDR : création de 4 divisions supplémentaires dans les collèges demandés)
- suppression de postes dans le second degré (- 298 élèves dans les Collèges du 13 : - 69 postes)
- mise en place d’un projet académique piloté par la performance, reposant sur la contractualisation des moyens et accompagnant une gestion individuelle des carrières (bataille de la hors classe).
Après la lettre de mission à Darcos, la lettre aux enseignants du Président présentée le jour de la rentrée confirme qu’il s’agit de faire mieux avec moins. Tout en essayant de neutraliser les réactions des enseignants, en parlant de Renaissance, de culture générale etc. La lettre confirme la volonté de « remise à plat des rythmes et des programmes scolaires », de réduction du volume éducatif (« il y aura moins d’heures de cours, les moyens seront mieux employés parce que l’autonomie permettra de les gérer davantage selon les besoins, les enseignants, les professeurs seront moins nombreux ») et laisse planer la possibilité d’une sélection à l’entrée en 6e qui sonnerait la fin du collège pour tous et d’une sélection à l’entrée en seconde.
Cet ensemble de déclarations et de décisions dessine une perspective où c’est l’ensemble du système éducatif qui est remis sur la table avec la volonté déclarée de le transformer en profondeur. C’est un sérieux défi qui nous est lancé.