Les professeurs de langues vivantes, qui se sont battus l’an dernier avec leurs collègues pour l’abrogation du décret sur l’évaluation par les chefs d’établissement, n’entendaient pas pour autant être caporalisés par des inspecteurs chantres de l’approche par compétences, de la division du travail en tâches, micro-tâches et tâches finales, de l’empilement de « bonnes pratiques ».

Nous n’imaginions pas que dans le contexte politique nouveau, au moment où se déroulent des débats préparatoires à la rédaction d’une nouvelle loi d’orientation pour l’Education Nationale, le ton resterait à l’injonction, au balisage pédagogique poussé à l’extrême et assorti de procédures obligatoires de plus en plus détaillées, à l’absence totale de concertation avec les professeurs.

Nous n’imaginions pas que nos IPR nous pousseraient à transformer les bulletins trimestriels en livret de compétences, en « souhaitant » que les évaluations des cinq compétences langagières y soient détaillées séparément, sans pour autant soutenir nos demandes d’augmentation du nombre d’heures d’enseignement des langues, ni se rappeler que le nombre de notes relève d’une décision pédagogique.

Nous n’imaginions pas que nos IPR, qui disent préconiser le développement de l’autonomie des élèves, ne laisseraient aucune marge aux professeurs, pourtant personnels de catégorie A, concepteurs de leur enseignement et non exécutants, leur refusant d’exercer leur sens critique et leur professionnalité.

Nous n’imaginions pas que nos IPR appelleraient de leurs vœux l’allongement de notre temps de travail et la généralisation des stages intensifs de langues pendant les vacances, niant ainsi le cœur de notre métier : nos heures de cours, hélas de moins en moins nombreuses, face à des groupes-classes hélas de plus en plus chargés.

Nous n’imaginions pas que l’utilisation des TICE serait présentée comme la panacée face à la dégradation des conditions d’enseignement et le moyen miraculeux de motiver nos élèves.

Nous n’imaginions pas que la remise en cause de nos statuts, la globalisation des horaires, l’annualisation, les expérimentations sans bilan et la déréglementation seraient renforcées et considérées comme des voies d’amélioration du système éducatif et de refondation de l’école.

Pourtant, dans la lettre de rentrée rédigée et signée par tous les IPR-IA de langues vivantes de l’académie d’Aix- Marseille, tous ces dispositifs destructeurs sont présentés comme des progrès et les enseignants sont fortement incités à les mettre en place. Nous pensons au contraire que chaque enseignant, dans le cadre de programmes nationaux et avec des examens finaux en point de mire, peut construire une progression adaptée à ses élèves. Nous défendons la transmission et la construction d’acquis collectifs, de savoirs et de connaissances, par une progression commune permettant in fine à tous les élèves d’être éduqués, critiques et compétents…

Nous demandons une diminution du temps de travail, du temps de concertation, un minimum de trois heures hebdomadaires de cours de langue, des groupes qui n’excèdent pas 24 élèves, des programmes nationaux élaborés en concertation, des évaluations nationales, une véritable formation initiale et continue.

Depuis des années les enseignants de LV dénoncent une politique qui fait de l’enseignement de leurs disciplines le cheval de Troie des réformes idéologiques au collège comme au lycée. La lettre de rentrée des IPR de langues vivantes de l’académie montre clairement le bien-fondé de nos analyses et de nos mobilisations.

Contre ces tentatives inacceptables de mise au pas de la profession, reprenons la main sur nos métiers !