22 janvier 2020

Notre académie, nos établissements

Déclaration des élus représentant les personnels au CTA Aix-Marseille - Mercredi 22 janvier 2020

Déclaration des élus représentant les personnels au CTA Aix-Marseille - (…)

Avec le soutien des syndicats


La réponse du SNES-FSU Aix-Marseille au courrier du recteur adressé aux proviseurs au sujet des mobilisations en cours : cliquer ici

Plan d’action de la semaine du 20 au 25 janvier, heures et lieux des manifestations du vendredi 24 janvier : cliquer ici

Avant de quitter la salle et de boycotter le CTA, les élus FSU CGT SIAES représentant les personnels, soutenus par SU Education et la CNT SO, ont lu la déclaration suivante

Monsieur le Recteur,
Mesdames et Messieurs,

Nous sommes réunis aujourd’hui pour une séance du Comité Technique Académique hors norme.

Cette séance est hors-norme car elle est convoquée alors que se déroule dans le pays depuis sept semaines un mouvement social contre la réforme des retraites, mouvement auquel l’opinion publique apporte majoritairement son soutien et auquel les personnels de l’éducation nationale participent avec force, détermination et ténacité. Dans deux jours, aura lieu une nouvelle grève nationale du public et du privé à l’occasion du conseil des ministres, grève qui s’annonce à nouveau majoritaire, et grève à laquelle nous invitons les personnels de l’administration, quelle que soit leur position dans l’organigramme, à nous rejoindre. Car nous sommes tous fonctionnaires.
Parce qu’elle écarte les fonctionnaires civils du Code des Pensions, cette réforme est une atteinte au statut du fonctionnaire d’État. La pension ne sera plus ni calculée sur la base des six derniers mois ni payée par le budget de l’État. Ce ne sera d’ailleurs plus une pension. La pension est un salaire continué conçu pour garantir aux fonctionnaires le maintien d’un niveau de vie digne après une carrière consacrée au service de l’intérêt général. Le régime universel, outre qu’il engendre un effondrement des pensions des fonctionnaires qui ont peu de primes, et les professeurs ne sont pas les seuls dans ce cas-là, banalise le service de l’État. Le régime universel, c’est une négation de la fonction, structurante de notre contrat social, que jouent les institutions de la République et les services publics. Ce n’est pas un hasard si ce sont les professions de l’État social, la main gauche de l’État, qui sont en pointe dans ce mouvement, enseignants et soignants en tête. Les personnels que nous représentons sont déterminés à obtenir le retrait de ce projet de loi. Des alternatives existent pour financer les retraites dans la durée.

Monsieur le Recteur, cette séance est hors-norme également car elle a pour objet d’entériner au niveau de notre académie les conséquences de la loi du 6 août 2019 dite « de transformation de la fonction publique ». A l’instar de la réforme des retraites qui dénature le lien entre le fonctionnaire retraité et l’État, cette loi dénature le lien entre le fonctionnaire actif et l’État. Parce qu’elle place le recours au contrat au même rang que le recrutement de titulaires, parce qu’elle facilite les restructurations et permet les abandons de missions, les délégations de service public, les externalisations, les privatisations, parce qu’elle encourage l’individualisation des rémunérations et des primes, parce qu’elle débride le pouvoir discrétionnaire du supérieur hiérarchique direct en matière de sanction, d’affectation, de promotion, de rémunération, cette loi, initiée par des acteurs économiques fanatiques de néo-libéralisme, rédigée par un exécutif ignorant du contrat social et de l’histoire de notre République, votée par une assemblée de godillots, est une forfaiture, un coup de force contre les Institutions de la République. C’est également un coup d’État contre la démocratie sociale puisqu’elle s’inscrit à rebours de la longue marche séculaire vers la démocratisation de notre État, dont le Conseil National de la Résistance, le statut de 1951 et les lois Le Pors de 1983/84 sont les jalons qui nous inspirent encore aujourd’hui. La démocratie n’est pas complète quand les contre-pouvoirs et les corps intermédiaires sont privés des outils qui leur permettent d’agir, quand le fonctionnement de l’appareil d’État et celui du monde du travail échappe à la délibération et à la confrontation des points de vue. Dans l’éducation plus encore, parce qu’il est en charge de l’émancipation de la jeunesse, le fonctionnaire est un fonctionnaire citoyen qui doit pouvoir jouir des attributs démocratiques du citoyen et avoir un droit regard sur le fonctionnement du service et sur les décisions de l’administration. Le dessaisissement des commissions paritaires de leurs compétences en termes de mobilité et de promotion est illégitime.

Monsieur le Recteur, cette séance est enfin hors-norme car elle ouvre la préparation de la rentrée scolaire 2020 sous l’égide d’un budget et de réformes qui continuent à dégrader le service public d’éducation, pour le plus grand profit des officines privées. Les créations d’emplois sont à nouveau insuffisantes pour financer les mesures annoncées dans le premier degré et pour suivre l’augmentation démographique dans le second degré. Pour accueillir 1700 collégiens et lycéens de plus, il faudrait 140 professeurs de plus, on nous en attribue 2 ! Depuis le début du quinquennat, le Ministre Blanquer n’a jamais doté l’académie des moyens dont elle avait besoin pour suivre l’évolution démographique. Dégradation du service public d’éducation également par le biais de réformes qui désorganisent les établissements, les CIO et les services, qui déstructurent les parcours scolaires, qui démantèlent la cohérence des enseignements. La réforme du lycée est ainsi un carnage pédagogique pour nos élèves, du fait de programmes inatteignables, d’épreuves inadaptées, d’évaluations permanentes et de sélection accrue. Nous tenons d’ailleurs à souligner le mouvement de refus des E3C qui s’étend, mouvement que nous soutenons, car ces épreuves symbolisent à elles-seules l’impréparation, l’infaisabilité et le manque de pertinence pédagogique de cette réforme du lycée, du baccalauréat et de l’accès à l’université.
Ces budgets étriqués successifs et ces réformes s’inscrivent dans un contexte d’épuisement professionnel, de lassitude et surtout de colère. Les raisons en sont connues : conditions de travail dégradées, locaux impropres à l’activité scolaire, manque de matériel, effets d’un management parfois agressif et souvent sot, manque de considération. Elles s’inscrivent dans un contexte d’écœurement face à la faiblesse chronique des rémunérations et aux discours médiatiques mensongers. Aussi, la profession n’acceptera pas une prétendue revalorisation aux effets lointains et insuffisants, revalorisation liée à des contreparties sur le temps de service, les missions, le management. Nos collègues exigent le dégel immédiat du point d’indice, une revalorisation immédiate et sans condition des salaires de tous. Ils n’accepteront pas un sous-statut low cost pour les jeunes professeurs. Car d’ores-et-déjà, les étudiants se détournent du professorat, et il serait irresponsable de mettre en péril les recrutements futurs dont le service public d’éducation, la Nation, ont cruellement besoin.

Monsieur le recteur, si la crise que nous traversons ne débouche pas sur des conquêtes sociales nouvelles, si le Ministre, le gouvernement, le président et sa majorité, s’entêtent dans une politique néo-libérale qui pulvérise le contrat social, alors il faut avoir conscience qu’il s’ensuivrait une crise politique majeure dont personne ne peut prévoir les conséquences.
Il est temps d’arrêter ces apprentis sorciers et d’imposer par le rapport de force social des politiques publiques qui répondent aux besoins de la population.
Nous y sommes déterminés.

Plan d’action de la semaine du 20 au 25 janvier, heures et lieux des manifestations du vendredi 24 janvier : cliquer ici

Déclaration CTA Aix-Marseille - 22 janvier 2020