La CA académique du SNES Aix-Marseille se réunira vendredi 16 novembre pour débattre de la stratégie du SNES dans les semaines qui nous séparent de la présentation du projet de loi d’orientation sur l’éducation.
Ci-dessous le projet de texte de la CA académique.
Fichier PDF téléchargeable en bas de page
Etat des lieux
après le « Pacte de compétitivité »
et avant la loi d’orientation sur l’école
Durant la campagne présidentielle, le SNES-FSU a appelé à battre le Président sortant. La poursuite des logiques politiques à l’œuvre alors aurait été redoutable. Rappelons simplement l’autonomie accrue des établissements avec le recrutement par le chef d’établissement ou l’augmentation du temps de travail.
Des améliorations, des hésitations, de l’austérité :
Aussi, nous avons accueilli favorablement la fin du non-remplacement d’un professeur sur deux partant en retraite et la promesse de création de 60 000 emplois dans l’éducation. Le collectif budgétaire de juillet nous a paru renouer avec la progressivité de l’impôt. Nous avons applaudi à l’abrogation du décret confiant l’évaluation des professeurs aux seuls chefs d’établissement, à l’abandon de la loi Cherpion sur l’apprentissage à 14 ans. Nous nous félicitons de l’annonce du rétablissement de la formation professionnelle pour les stagiaires et de la disparition du mouvement dérogatoire ECLAIR. Nous avons joué le jeu de la concertation en vue de refonder l’école de la République et nous avons porté, non sans réussites, nos arguments dans le débat public pour une relance de l’investissement éducatif. Ces évolutions positives s’inscrivent dans la suite logique des actions que nous avons menées sans relâche durant la décennie précédente, comme d’ailleurs, à une moindre mesure, l’allègement du livret de compétences, et les modestes mesures d’urgence pour les vies scolaires à la rentrée 2012, ou encore le rétablissement partiel de la retraite à 60 ans pour les carrières longues. Oui, notre syndicalisme est utile et efficace !
Dans le même temps, nous n’avons pas manqué de nous interroger sur l’absence de mesures d’urgence autour de nos salaires et de nos conditions de travail, de remise en cause de la réforme des lycées. Dans les établissements, l’heure est toujours au management, à la prescription, à la pression hiérarchique. Face aux incivilités et aux violences qui émaillent l’actualité, la tentation de l’étouffement et du refus de dispositifs collectifs de prise en charge des problèmes (journées banalisées, recours au CHSCT, …) reste présente. Les établissements sont désorganisés du fait des nouveaux dispositifs (accompagnement personnalisé, groupes de compétences, expérimentations diverses, contrôle en cours de formation en langues vivantes, épreuves d’histoire des Arts). Le sabordage de la voie technologique se poursuit avec l’imposition du changement de discipline.
Si nous suivons avec intérêt les débats sur le non-cumul des mandats ou le mariage pour tous, nous restons, avec RESF, vigilants quant au respect des droits des étrangers et nous attendons de voir ce que deviendra la question du droit de vote des étrangers aux élections locales.
Le gouvernement assume les logiques européennes des politiques d’austérité : la valeur du point d’indice reste gelée, et il n’y a pas pour l’heure de perspective pour nos salaires et nos carrières, malgré le constat partagé d’un décrochage des rémunérations des professeurs par rapport aux autres fonctionnaires. Jour de carence et chiches remboursements des frais professionnels engagés redoublent les effets de la dévalorisation salariale de nos professions. Pourtant, sans aucune contrepartie, le gouvernement ne vient-il pas de faire cadeau de 20 milliards aux entreprises en annonçant de nouvelles coupes dans les dépenses publiques et la hausse de l’injuste TVA ?
Dans l’éducation, à l’heure des choix !
Alors que le Ministre s’apprête à divulguer dans les jours qui viennent son projet de loi d’orientation sur l’école, dont l’objet est de refonder l’école de la république, la majorité présidentielle va abattre ses cartes de politique éducative. La loi d’orientation devrait être présentée en conseil des ministres début janvier, adoptée au Parlement à la fin du mois de janvier et pour application dès la rentrée 2013.
L’orientation de ce projet de loi correspondra-t-elle à ce que nous portons, à savoir renouer avec l’investissement éducatif pour résorber le noyau dur de l’échec scolaire et amener chaque élève à une qualification supérieure, afin de répondre aux besoins d’une société en crise ? Car oui : relever le défi économique suppose d’investir dans l’innovation et la recherche, relever le défi social suppose d’investir dans la généralisation des qualifications et la promotion de la culture commune, relever le défi démocratique suppose d’investir dans la transmission de savoirs émancipateurs et favorisant l’esprit critique de citoyens ouverts sur le monde et sa diversité, alors que le repli sur soi et la haine de l’autre sont en passe de gangréner la société française !
Ou bien, ce projet s’inscrira-t-il dans la logique de renoncement qu’incarne la primarisation du collège, l’évacuation précoce et massive des élèves issus des milieux populaires vers les dispositifs régionalisés (voie professionnelle, apprentissage, prise en charge du décrochage), la disparition de la voie technologique, fabuleux outil de démocratisation, l’accès aux lycées limité à une minorité d’élèves destinés aux études longues (bac-3/bac+3) ? Ce projet présenterait pour nos élites l’intérêt de s’inscrire dans des logiques budgétaires contraintes par les politiques d’austérité assumées par la France.
Dans les jours qui viennent, cette alternative sera tranchée
Le choix de l’offre au détriment de la relance par la demande : alerte !
Aussi, nous lançons à la profession une alerte solennelle : le récent « Pacte de compétitivité » implique une nouvelle cure d’austérité avec la réduction annoncée des dépenses de l’Etat de 10 milliards, après les annonces du budget d’austérité 2013. Le pouvoir d’achat des salariés et des retraités va pâtir de la hausse des impôts 2013, de la hausse annoncée de la TVA en 2014, de la poursuite des augmentations de cotisations retraites (réforme Woert de 2010) entrainant une baisse de notre salaire net. Avant un basculement au printemps du financement de dépenses de protection sociale des cotisations sociales vers la CSG. Avant une nouvelle réforme des retraites dont le but sera certainement de basculer de notre système à prestations définies (taux de remplacement connu) vers les comptes notionnels (prestations variables en fonction de la valeur annuel du point). Dans le même temps, les partenaires sociaux sont invités à négocier une déréglementation du marché du travail qui accroisse la flexibilité et facilite les licenciements. Dans le cadre de l’Etat, si la RGPP est abandonné dans sa dimension systématique, si le décret sur la mobilité professionnelle est abrogé, les logiques de réforme de l’Etat et de décentralisation sont confirmées pour favoriser la baisse des dépenses publiques.
Le gouvernement s’inscrit dans une politique de l’offre visant à réduire le coût du travail alors même que le pouvoir d’achat est fortement contraint par plusieurs décennies de partage déséquilibré de la valeur ajoutée. Si des mesures symboliques sont prises, le gouvernement ne semble pas s’orienter vers une révolution fiscale qui permettrait de rendre à l’impôt son efficacité redistributive.
Un mouvement social construit avec les autres syndicats européens est donc nécessaire pour rompre avec les politiques d’austérité qui enferment l’Europe dans le cercle vicieux de la récession. La participation du plus grand nombre aux manifestations du mercredi 14 novembre à l’appel de la CES et des organisations syndicales françaises CGT, CFDT, FSU, UNSA, Solidaires, s’impose.
Quatre questions pour juger de la loi d’orientation
Dans l’éducation, quatre marqueurs permettront de juger du contenu de la loi d’orientation.
a) Le gouvernement entend-il adopter des mesures ambitieuses pour répondre à la crise de recrutement qui frappe nos professions en mettant en place de véritables prérecrutements en cours de cursus universitaire, en revalorisant nos salaires, en inscrivant les professeurs français dans le mouvement général d’élévation des qualifications requises pour ce métier ?
b) Le gouvernement entend-il renforcer le second degré en lui donnant les moyens de lutter contre l’échec scolaire et d’offrir à chaque élève les voies diversifiées d’accès aux qualifications ou se délestera-t-il en décentralisant vers les régions de l’orientation scolaire, de la formation professionnelle initiale, de la lutte contre le décrochage, dans le droit fil des récentes annonces ?
c) Le gouvernement entend-il s’inscrire dans la continuité des parcours scolaires de la maternelle au supérieur en favorisant à chaque niveau les transitions et les poursuites sans nier les spécificités de chaque étape (maternelle, école, collège, lycée, supérieur) ni celle des métiers et des personnels ? Ou bien décidera-t-il de faire au moyen des « réseaux du socle » du collège une école primaire prolongée en favorisant la montée de professeurs des écoles au collège et le développement de la bivalence des professeurs de collège ?
d) Des premières mesures doivent être prises dans le cadre de la préparation de la rentrée 2013 pour revenir sur les aspects les plus nocifs de la réforme des lycées et de la réforme STI2D. Aucun stagiaire ne doit avoir 15 h de service à la rentrée 2013.
C’est à l’aune des réponses à ces questions que le SNES – FSU appréciera dans les jours qui viennent le contenu du projet de loi d’orientation et du rapport politique qui lui sera annexé. C’est à l’aune des réponses à ces questions que le SNES – FSU proposera à la profession les modalités de son expression dans le débat public autour de cette loi d’orientation.
Conclusion :
De ce point de vue, la décentralisation vers les Régions de l’orientation scolaire et de la formation professionnelle initiale ou l’inscription dans la loi d’une incitation à mettre en place localement des expérimentations « Réseaux du Socle », en utilisant l’article 37-1 de la Constitution (expérimentations législatives), et permettant des échanges de services entre premier et second degré et des modifications locales par le CA des statuts des personnels (services, bivalence), sont des lignes rouges qui nécessiteraient une réaction immédiate de la profession.
Le SNES–FSU est vigilant, prêt à l’action, y compris la grève et la manifestation nationale, car convaincu qu’il y a moyen de renouer avec une politique ambitieuse pour nos métiers, nos salaires et nos élèves.
A suivre, donc. En se syndiquant, en se tenant au courant, en étant prêt à l’action, à commencer par les manifestations du 14 novembre.
Le secrétariat académique du SNES Aix-Marseille