Face à la pandémie ravageuse présente, chef de l’Etat et gouvernement poursuivent les choix de l’ancien monde. Ci-après quelques lectures, parmi tant d’autres. Nul doute que les forces syndicales doivent plus que jamais se faire entendre.

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 Non, nous ne sommes pas en guerre<small class="fine d-inline"> </small>! Maximes Combes

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Les mots ont un sens. Nous ne sommes pas en guerre. Nous sommes en pandémie. Nous ne sommes pas des soldats, mais des citoyennes et citoyens. Nous ne voulons pas être gouvernés comme en temps de guerre, mais comme en temps de pandémie. La solidarité et le soin doivent être institués comme les principes cardinaux de nos vies. La solidarité et le soin. Pas les valeurs martiales et belliqueuses.
Point besoin d’économie de guerre pour cela. Juste besoin d’arrêter de naviguer à vue et d’enfin prendre les mesures cohérentes entre elles, fondées sur ce principe de solidarité, qui permettront que chaque population, riche ou pauvre, puisse faire face à la pandémie. La participation consciente et volontaire de l’ensemble de la population aux mesures de confinement nécessaires n’en sera que facilitée. Et la dynamique de l’épidémie d’autant plus facilement brisée. Le monde de demain se joue dans les mesures d’exception d’aujourd’hui.

 Les efforts de «<small class="fine d-inline"> </small>guerre<small class="fine d-inline"> </small>» ne sont pas centrés sur le sanitaire

Romaric Godin et Manuel jardinaud, Mediapart
La totalité de l’article est ici

Extraits

« Malgré les mesures d’urgence, le gouvernement n’ajuste pas l’ensemble de l’économie à la crise sanitaire. La lutte contre le Covid-19 n’est pas la seule priorité : il poursuit une stratégie de croissance en exigeant l’adaptation des salariés. (…) L’irruption du Covid-19 a suspendu de facto l’économie marchande.
En effet, sans le soutien de l’État, cette dernière disparaîtrait rapidement ».
« La priorité de l’organisation économique a changé. Jusqu’à la semaine dernière, cette organisation visait à générer du profit et favorisait largement la mobilité du capital. Depuis cette semaine, ce fonctionnement n’est plus possible ».
« Face à cette situation, il y a deux voies possibles. La première est de considérer la crise actuelle comme une parenthèse. Les pouvoirs publics ont alors pour tâche de maintenir l’économie marchande en sommeil en préservant son avenir. La seconde, c’est de changer de priorité et d’orienter uniquement la production vers la lutte contre l’épidémie et la poursuite du bien-être minimal des citoyens. Et cela suppose une planification et un contrôle étroits des modes de production ».

Macron a choisi naturellement la première voie : un immense plan de soutien aux entreprises. Si les réformes néolibérales sont suspendues (retraites…), elles ne sont nullement abandonnées. Les concessions sociales pour les salariés sont très faibles.
Il s’agit d’attendre le rebond, et de repartir comme avant. En faveur des entreprises et des puissants. L’état d’exception pèse sur les salariés, c’est cela le contenu du projet de loi en cours. Pour s’en convaincre, voici l’analyse des avocats du droit du travail.
La guerre est seulement économique ! Revoir les congés, la RTT, tout semble ouvert en termes de révision encore et toujours de droit du travail…
Rien par contre sur l’urgence de la situation ! Les hôpitaux ? les secteurs économiques vitaux ? Quelle sécurité pour les travailleurs ?
La championne en la matière ? La ministre du travail Pénicaud.

« Dans un contexte où ils seraient certains de ne pas être contraints de travailler pour la valorisation de leur entreprise mais pour l’intérêt général, ceux qui sont indispensables au pays auraient conscience de leur responsabilité et de leur valeur. Pour traduire cette réalité, il reviendrait alors aux pouvoirs publics d’offrir des conditions de sécurité optimales à ces travailleurs ainsi que des primes de risque. Mais il faut bien être clair : nul n’a envie aujourd’hui de prendre le risque de sa vie et de celle des autres pour soutenir les bénéfices des géants de la distribution et de l’agroalimentaire. Le gouvernement, plutôt que de donner des leçons, devrait en prendre conscience. Et faire son aggiornamento : face au virus, l’économie capitaliste est impuissante et contre-productive. Il est peu inspiré de vouloir la ménager ».
Le bien précieux, c’est le travail ! Ce gouvernement est décidément emprisonné dans l’ancien monde.
« Or si effectivement toutes les forces de la nation doivent être tendues vers le combat contre l’épidémie, cela suppose deux actions prioritaires. La première est celle qu’on vient de voir : le respect du confinement et la limitation des interactions sociales passent par une réorganisation du travail essentiel à la vie de la nation. La seconde est que toutes les forces disponibles doivent être lancées dans la bataille médicale. »

C’est quoi une économie de guerre ? C’est réorienter la production sur les besoins et ces besoins sont immenses, notamment à cause des politiques néolibérales passées... cf la tragédie de l’hôpital et le scandale de la pénurie des masques...

« Serait-ce impossible ? Certainement pas. Cette réorientation planifiée dans l’urgence est le propre de l’économie de guerre. Il faut, pour cela, prendre le contrôle des usines capables de produire ce matériel, et en construire si ces capacités n’existent plus. Cela suppose une planification et une administration directe de l’économie en fonction des besoins. En théorie, on n’aurait guère le choix devant l’urgence. Mais ce n’est pas la stratégie suivie parce qu’elle suppose, lorsque la crise sera passée, une phase longue de stabilisation de l’économie. Le gouvernement ne veut pas se retrouver dans cette situation. Son choix, c’est de retenir son souffle et de repartir comme avant ensuite.
Une telle priorité supposerait aussi de récompenser ceux qui sont en première ligne, le personnel soignant, à sa juste valeur. Par des primes, du salaire, des recrutements et des investissements. Ce que nous apprend avec violence la crise actuelle, c’est qu’il est socialement utile que les hôpitaux soient financièrement en déficit, ne soient pas gérés en flux tendus et présentent, en temps normal, des surcapacités. C’est cela qu’il faut prendre en compte et préparer dès maintenant. Il ne faut donc pas, compte tenu du sous-investissement actuel, regarder à la dépense. Non seulement le moment l’exige, mais l’avenir l’exigera aussi.
Mais que dit le gouvernement face à cela ? Que les forces mises dans la bataille médicale resteront comptées (2 milliards d’euros, soit 2,3 % de plus que prévu sur 2020 et pas de Projet de loi rectificatif de financement de la sécurité sociale) et que, comme l’a dit mercredi 18 mars le ministre de l’action et des comptes publics, Gérald Darmanin, « la meilleure prime que l’on peut donner au personnel soignant, c’est de respecter les gestes barrières ». Voilà des héros qui peuvent compter sur bien peu de reconnaissance de la nation.
Et dès lors, il faut le reconnaître, sans, au reste, préjuger de l’avenir et des évolutions futures : l’État français reste enfermé dans une logique néolibérale centrée sur la croissance future et la gestion des déficits. La crise ne dissimule pas son caractère de classe. Ses dirigeants, aveuglés par l’illusion que « le télétravail pourvoira » et que la croissance est la finalité absolue, sont insensibles à la réalité du travail. Pas davantage qu’auparavant, le travail et ses conditions, dont la nécessité devient pourtant évidente, ne sont prioritaires.
Même en pleine crise sanitaire, l’État néolibéral reste enfermé dans sa guerre au monde du travail. Et ce n’est pas de bon augure car si la priorité économique n’est pas la lutte contre la maladie, cette dernière sera beaucoup plus difficile à combattre. En voulant ménager la croissance, on met en danger la politique du confinement et son efficacité. Il n’est pas sûr qu’au bout du compte, le pays en sorte plus renforcé à court comme à moyen terme ».